Y a des moments où on ne peut pas échapper à certains sujets de conversation.
Au « alors, ça va la rentrée ? » de mise pour l’heure, je réponds par un oui vague. Quelle rentrée, en effet ?
Dans la senioritude, septembre n’est plus synonyme de retour au travail, de même que l’été n’est plus associé à l’idée de vacances. Le temps est sans forme.
Je suis enfin sortie du monde du labeur (avec l’ambiance particulière des services publics sinistrés, qui transforment les emplois en authentique torture – en accord avec l’étymologie « tripallium » du mot travail)
Et au vu de la gueule riante du monde du travail, ne plus y être est gage, au minimum, d’absence de stress et de burn out (euh, mot qui n’existe pas, scusi, pardon pardon, mes doigts ont fourché, je ne voulais pas déclencher l’alarme, je ne le ferai plus !).
Cette année, cette non-rentrée suit un été où, première fois depuis longtemps, je n’ai pas voyagé.
Pas d’envie, pas de fric, avec la canicule qui écrase, et la conscience écolo du monde qui s’écroule, accompagnée du complexe grandissant de l’empreinte carbone qui culpabilise et j’en passe.
Du coup, « atome, souit ome ! »
Et comme le disait un ami, qui, aimant la logique binaire, associait de temps en temps des termes opposés pour une philosophie basique, mais irréfutable (salut à lui s’il lit ces lignes) : « pour rentrer, il faudrait déjà être partie ».
Donc, pas de rentrée, puisque pas de sortie, et circulez, y a rien à voir.
Dans mon été oisif et cloîtré (pour cause de chaleur affolante, et de périodes de vent fort décourageant, et de mer fréquemment méduseuse ou très très glauque), j’ai passé pas mal de temps sur les réseaux sociaux, me faisant la réflexion que, parmi les gens que je connais, certains me paraissent, à l’inverse de moi, pris d’une sorte de frénésie de voyages lointains, comme s’ils se disaient que, bientôt, ils ne pourront plus le faire, quand la planète sera en biberine totale, et qu’ils se la font staïle bouquet de feu d’artifice. Et une dernière destination exotique, avant les soldes, et encore une autre, et une belle rouge, et là, oh, une bleue ! Une de mes connaissances, par exemple, alors qu’elle vient d’atterrir de l’autre bout du monde, a déjà réservé le voyage suivant. Il me semble qu’elle en est à quatre voyages en 9 mois.
Ça me troue, en fait !
(J’adore cette expression, que je cherche toujours à imager dans ma tête, aboutissant à des trucs surréalistes un peu à la noix. Parce que le trou dont il est question sans le nommer, il existe déjà, non ?).
Avant de décider de rester chez moi, je m’étais collée à chercher une destination possible.
Pas envie de villes banalisées, toutes pareilles, avec du mobilier urbain partout identique, les mêmes chaînes de magasin vendant du produit chinois everywhere, la queue en tout lieu, et le temps limité pour apercevoir des paysages dont l’accès est maintenant payant.
Dans la foulée, un coup d’oeil sur ce qui se pratique de plus en plus dans le monde, avec les lieux « instagrammables », m’a totalement dissuadée.
Il y est question d’endroits du monde visités par des multitudes continues, juste le temps d’un selfie, les gens passant à toute allure, en ne conservant que le cliché, idéal, d’un monde qui n’existe pas. Pendant ce temps-là, un garde surveille et signale le temps autorisé pour chacun d’un coup de sifflet romantique, encouragé par la foule qui attend et qui crie « go go go ! ».
Et le passage est tel que le lieu se dégrade à toute allure.
et la face cachée…
(…de la photo précédente)
A QUOI BON TOUT CA ?
Je rêvais d’îles (un rêve bien banal, j’en conviens), et d’île déserte plus particulièrement, après une année un peu rude et bousculée.
J’ai cru trouver mon paradis : les Iles Eparses.
Un copain m’en ayant parlé, je suis allée à la recherche de renseignements.
Langue parlée : le français (chouette !)
Monnaie : l’euro (fastoche !)
Et du lagon bleu, de la bio diversité comme s’il en pleuvait, une merveille !
En plus, pas embêtée… comme le signale wikipédia : le nombre d’habitants étant égal à zéro, et donc, le nombre d’habitants au km² aussi égal à zéro (on n’est jamais trop précis), finalement, on n’y dépense rien et on n’y cause pas.
Calme, cool, loin de tout (comme si l’on pouvait être loin de quelque chose en ce siècle – google m’espionnerait pour savoir illico quelle conversation j’ai bien pu tenir avec l’absence d’habitants du lieu).
C’était peut-être un peu « trop » reposant. J’ai lâché l’affaire.
Finalement, je me suis rabattue sur le dark tourism, le must de la nouveauté.
L’idée est d’aller dans des lieux non touristiques, en pratiquant le tourisme du lendemain – ou surlendemain, en l’occurrence – de catastrophe.
J’ai fixé mon choix sur le tourisme nucléaire, et décidé d’aller visiter Tchernobyl. Pripiat, la ville qui fait rêver, qu’ils disent.
La zone est restée hautement dangereuse (alors même qu’un nouveau sarcophage y a été construit en 2016), mais on peut la visiter, encadré, harnaché, préparé, contrôlé, minuté. Avec des risques d’y choper des trucs. Frisson garanti. Waouh !
Trop génial.
Hélas, damned, il y a quand même eu 50000 visiteurs en 2018.
Et je gage que ce n’est pas plus cool à Fukushima.
De surcroît, pour moi qui suis adepte de l'(in)organisation de dernière heure, c’est compliqué.
Plus que jamais, « l’at (h)ome » me semble synonyme de sweet !
Et mon piano est en meilleur état.